RMC Sport

Rudi Garcia: "C'est une obsession, on veut être à Lisbonne!"

EXCLU RMC SPORT - A la veille d'affronter la Juventus Turin en huitième de finale retour de Ligue des champions, l'entraîneur de l'Olympique lyonnais s'est longuement confié.

Le jour- J arrive, 163 jours après le match aller, après une préparation record de 61 jours, c’est difficile de se dire au cœur de l’été qu’on est sur un huitième de finale retour de ligue des champions? 

Non, non, on est complètement investi dans ce match. On l’était pour la finale de Coupe de la Ligue la semaine dernière. Il a fallu digérer le fait qu’on n'ait pas gagné en perdant la rencontre aux tirs au buts. Après, sur la motivation, il n’y a pas de problème, pour les joueurs, pour le staff... On a tous envie de jouer ce match-là, même si on va le jouer dans des conditions particulières parce que les matchs de Champions League sont à huis clos. Autant au stade de France on a eu la chance d’avoir au moins pratiquement 1000 supporters de l’Olympique Lyonnais, à Turin on n'aura personne avec nous mais la Juve jouera aussi sans ses supporters. Ce sera particulier, il faudra aussi faire avec ce paramètre-là.

>> Abonnez-vous à RMC Sport pour suivre Juventus-Lyon en exclusivité

Il y a 70% de probabilité de se qualifier après avoir gagné le match aller 1 à 0 mais quand le match retour est trois semaines plus tard. Est-ce que c’est le même chiffre quand c’est un semestre presque derrière? 

Vu l’adversaire qui nous est proposé, on va dire que c’est du 50-50 mais effectivement il faut aussi qu’on se rappelle qu’on les a battus, c’était un match magnifique chez nous au Groupama stadium devant les supporters. Mais on a fait l’exploit de battre la Juve, on n’a pas pris de but et on a marqué par Lucas Tousart un but qui, je l’espère, pèsera dans la balance à l’heure des comptes à la fin du match retour. Ce qui est certain, c’est que on ne va pas se contenter de défendre ce but d’avance. Il faut absolument tout faire pour marquer au Juventus stadium.

Immédiatement à la fin du match face à Paris, on a vu une vidéo dans le vestiaire où vous disiez aux joueurs, 'la semaine prochaine, si on fait le même genre de match, on sera en quart de finale, ça vaudra toutes les coupes de la ligue', est ce qu’il faut positiver encore plus que d’habitude ? 

Oui, je pense que c’est ce que je vous disais, c’était gérer l’aspect psychologique du fait qu’on est pas gagné cette Coupe de la Ligue et que ça se soit joué vraiment à très peu de choses mais il fallait remettre tout de suite les joueurs dans la préparation de la Champions League. On n’avait pas le temps de se lamenter, il fallait absolument remettre les énergies, des énergies positives pour cette préparation pour ce grand rendez-vous.

Raisonnablement, éliminer la Juve et puis après gagner "le Graal", c’est le mot vous avez employé justement dans ce petit discours, qu’est-ce qu’y vous fait penser que c’est jouable, que votre groupe peut le faire?

On va prendre les choses les unes après les autres. Pour l’instant il faut déjà sortir la Juve et se qualifier pour ce Final 8 et aller à Lisbonne. Notre objectif c’est ça, il faut concentrer nos forces et notre énergie sur ce match retour et encore une fois on sait que si on marque, il faudra qu’ils marquent trois fois. , Si on prend un but, ne pas paniquer, si on marque, ne pas penser que c’est fait aussi. Il faudra être présent de toute façon tout au long du match en espérant qu'on ait pas besoin d'aller en prolongation. Mais si jamais on y allait, on a fait une bonne préparation en finale de la coupe de la ligue."

Vous avez toujours dit avant ce match qu’il y avait un déséquilibre, parce qu’il y a une équipe qui a joué 14 matchs officiels, et vous un seul avec 60 jours de préparation. Au final est ce que c’est toujours un désavantage pour l’OL? 

Oui je le pense, ça parait logique. D’autant plus que la Juve n’a pas eu besoin de 38 journées pour être sacrée de nouveau pour la 9e fois championne d’Italie. Elle l’a été à la 36e journée donc ça veut dire que la 37e et la 38e journée... Certes, les matchs étaient tous les trois jours mais quand ils vont arriver contre nous, ça fera 15 jours qu'ils auront été tranquille d’un point de vue athlétique et où ils auront pu se ressourcer. Donc dans ces conditions, oui, ce sera un avantage certain pour la Juve. A nous, sur un match, d’élever notre niveau comme on l’a fait contre le Paris Saint-Germain. Même si on a vu dans cette finale qu’il y a eu besoin de beaucoup de temps de récup' entre les actions à haute intensité. Mais c’est normal pour Paris comme pour nous. On ne retrouve pas le rythme de la compétition comme ça. Et je pense qu’il faudra aussi se méfier outre l’entame du match et de ce qu’on dit d’habitude sur un match retour de coupe d’Europe mais aussi des 15-20 dernières minutes du temps règlementaire. Là, ils auront un avantage certain sur nous d’un point de vue physique.

Il faut compenser par quoi du coup? 

Du mental, de l’organisation, jouer avec le résultat. On verra où on en est à ce moment-là du match. S’il faut pousser pour marquer ou s’il faut tenir. Ce qui est certain, c’est qu’il ne fera pas bon faire que défendre là-bas si on veut se qualifier.

Quel poids va représenter justement l’absence des supporters?

On dit toujours que de jouer à domicile devant son public, c’est un vrai atout, et c’est une vérité. On espère que jouer à huis clos sera un avantage pour nous.

On sent de la joie, de l’allant, qu’est ce qui a fait naître ça ? 

Il y a un véritable esprit d’équipe qui anime les joueurs depuis la reprise le 8 juin. Tout le monde bosse très bien, tout le monde travaille fort. Et puis, tout le monde s’entraide. On l’a vu face du Paris Saint-Germain: on a vu les attaquants défendre et toute l’équipe attaquer quand cela était nécessaire. C’est grâce à cet esprit d’équipe qu’on doit être capable de se qualifier pour les quarts-de-finale. En tout cas, c’est un atout supplémentaire, c’est certain. Les joueurs sont des compétiteurs, ils ont très envie d’éliminer cette déception par une vraie satisfaction et la satisfaction, il y en aura qu’une: c’est de se qualifier.

Que vous inspire la Juventus? 

Du respect! J’entends beaucoup de débats sur la qualité du jeu de la Juve. Mais quand on n’a pas besoin de 38 journées pour être sacrée championne d’Italie pour la neuvième fois... Je crois que tout est dit. La Juve ne perd pas. Si elle avait besoin de ces 6 derniers points dans les deux derniers matchs elles les auraient pris. Voilà, ils finissent comme d’habitude devant tout le monde car ils n’ont pas de concurrents en Italie. On sait qui on joue. On joue une équipe qui, depuis qu’elle a pris Cristiano Ronaldo, est bâtie pour gagner la Ligue des champions tout comme le Paris Saint-Germain. C’est pour ça que Cristiano Ronaldo est arrivé. De toute façon, il gagne le championnat chaque année donc ils ont un objectif majeur, c’est de gagner la Ligue des champions donc ça rehaussera notre qualification si on est capable de l’obtenir.

On a vu que la Juve a pris régulièrement des buts...

C’est peut-être quelque chose qui a pu changer par rapport à avant. C’était une équipe ultra solide. Elle avait quatre joueurs sur le plan défensif qui était des tops joueurs et qui sont des leaders aussi : Buffon, Chiellini, Barzagli et puis Bonucci. Maintenant il ne reste que Bonucci, et avant la Juve ne prenait pas de but maintenant elle en prend plus, elle est peut-être un peu plus friable. 

On a vu l’état de la Juve. Où en est l’OL? Comment vont les têtes et les muscles? 

Ils vont bien, les têtes vont bien. jeudi après-midi quand on s’entrainera sur le terrain de match à Turin, on aura tout l’effectif à part Tino, Kadewere qui n’est pas qualifié pour cette compétition. Mais tous les autre sont concernés et on a pas de pépin pour l’instant donc tout va bien.

Quel programme a-t-il fallu imaginer?

Non il a fallu gérer le physique parce que ceux qui ont joué les prolongations, pour un match de reprise, ce n’était pas ce qu’il y avait de meilleur. A bien y réfléchir, on aurait dû demander le PSG et nous à jouer directement les tirs au but à la fin du temps réglementaire. Je pense qu’on aurait dû anticiper sur cette chose-là. Même si, à la limite le PSG a 15 jours pour récupérer donc ce n’est pas grave pour eux. Mais nous on avait que six jours et donc on a fait très très attention, d’habitude on met 48 heures d’attention sur le plan physique, là on en a mis 72 pour ceux qui avaient joué 120 minutes on a été très prudents jusqu’à la grosse séance mardi après-midi.

Est-ce qu’il y a plus de précautions prises par rapport au Covid, on a vu en France qu’il pouvait y avoir des cas, est ce que vous avez redoublé d'efforts?

Oui, comme il y a des résurgences un peu partout. Il y a des clubs qui sont touchés. Le doc est repassé et a remis une couche. Il a eu raison, notamment sur les gestes barrières, le port du masque à l’intérieur. Il faut qu’on soit attentifs. On ne peut pas se permettre de perdre des joueurs. On fera tout pour aller à Lisbonne et j’espère qu’on ira. Et quand on y sera, on ne peut pas perdre des joueurs à cause de ça également. Il faut que les joueurs, le staff et tous ceux qui sont autour de l’équipe évidemment soient très prudents en dehors. Et puis quand on est ensemble, ça vaut le coup de prendre quelques précautions.

Faut-il lutter contre un pessimisme sur la potentielle absence de coupe d’Europe l’année prochaine? 

Ça sert surtout à rien d’en parler. Si on veut aborder le match dans les meilleures conditions, ce n’est pas le moment de parler de coupe d’Europe ou pas la saison prochaine. On a un match à jouer, une qualification. Pour l’instant, ça suffit bien à notre concentration. Il faut se concentrer là-dessus. Il faut se rappeler qu’on les a battus aussi. On a produit du jeu, on a fait une excellente première période. On a mis cette Juve en difficulté, en deuxième c’était plus dur, donc il faudra être capable de reproduire ces séquences de jeu. Comme je vous le disais, si on joue que pour ne pas prendre de but, et que pour subir, on perdra et on se fera éliminer donc il faut aussi jouer notre jeu, attaquer et marquer. Parce que c’est ce qu’on n’a pas su faire contre le PSG en finale et c’est ce qu’il faudra faire à Turin.

Qu’attendez-vous justement de plus de vos hommes qui ont été mine de rien presque irréprochables dans l’investissement?

Un tout petit peu plus d’efficacité dans le dernier geste, la dernière passe. Par contre, oui, qu’ils gardent la même abnégation, la même solidarité sur le plan défensif. Il y a eu beaucoup d’entraide, on a pas laissé beaucoup d’occasions au Paris Saint-Germain si ce n’est des tirs de loin donc il faudra être capable de bien défendre comme on l’a fait mais aussi mieux attaquer. Parce que je pense qu’on doit être capable de plus cadrer, on a tiré beaucoup plus que le PSG en finale mais on a pas assez cadré donc si on veut marquer des buts, il faudra cadrer nos occasions.

Le système en 3-5-2 la semaine dernière sert de fil rouge dans la préparation? 

Oui pour l’instant. C’est un système qu’on gère de mieux en mieux et puis c’est un système hybride parce qu’avec Maxwell et Marçal dans la même équipe, on peut passer à quatre ou à trois en toute tranquillité pendant le même match.

Face au PSG, Bruno Guimaraes n’a pas eu l’envergure que l’on a pu voir dans les autres matchs. A quoi l’attribuer? 

Peut-être physiquement, parce que c’était son match de reprise à lui aussi. Un moment dans la préparation, il a fallu le couper un peu car il avait quelques alertes au niveau du genou mais tout est rentré dans l’ordre mais il a fait un peu moins de matchs que les autres. Et puis peut-être, c’est un jeune joueur aussi. D’ailleurs il n’y a pas grand-monde qui a l’habitude de jouer des finales et des matchs de ce niveau-là dans notre groupe. Et donc j’ai parlé avec Bruno sur l’approche du match. Il faut être plus tranquille, plus calme. Pour tout le monde, c’était important. Le match il commence au coup d’envoi de l’arbitre allemand et avant ça ne sert à rien de se jouer le match trop tôt. Il faut être concentré certes mais faut être tranquille, serein, par contre il faut lâcher les chevaux au coup d’envoi et ça suffira à ce moment-là. 

Dans un match comme ça, il faut un facteur X. On pense à Memphis Depay qui ne devait pas jouer le match retour dans des conditions normales. Le sentez-vous plus revanchard? 

Il a très envie, il sait déjà que c’est vraiment un exploit pour lui et pour Jeff d’être dans le groupe et pour Memphis d’avoir pu jouer la finale de Coupe de la Ligue. Bien évidemment, ce sont des grands joueurs qui peuvent faire basculer une rencontre. Et après il faut aussi un facteur réussite. Le facteur X, c’est aussi la réussite. Il faut qu’on soit capable de faire tourner la roue du bon côté. Elle n’a pas tourné du bon côté contre Paris alors que ça aurait pu tomber chez nous. Mais ça veut dire qu’on peut hausser encore le niveau d’efficacité et certainement le niveau d’agressivité dans le bon sens du terme y compris devant le but adverse pour marquer ce but qui, j’espère, nous enverra au paradis.

Est-ce que vous sentez que c’est difficile pour les joueurs de rentrer dans la Ligue des champions comme ça en plein été? 

Non je ne crois pas, on termine cette saison 19/20 avec beaucoup de retards certes mais on la termine comme toutes les équipes de Champions League.

La finale perdue la semaine dernière sert quand même de très bonne base pour aborder ce match?

Indubitablement. Tenir tête au PSG pendant non seulement 90 minutes mais 120 minutes, c’est quand même une référence, ça doit donner confiance aux gars. 

Et rendez-vous à Lisbonne? 

Franchement oui! 

C’est une ville et un objectif ? 

Oui, c’est une obsession, on veut être à Lisbonne!

Propos recueillis par Edward jay